Bruits de Campagne!

Publié le par festibrasseurs52

Bruits de Campagne!

Vu dans les médias, le billet du jour du JHM qui cite la pétition en cours et reçu hier via les réseaux sociaux, l'excellente chronique de notre ami Daniel Monnier qui évoque à la fois la crainte de voir nos forêts s'éclaircir dangereusement pour renflouer les caisses de l'ONF (auquel s'ajoutent les besoins à venir du projet SYNDIESE...), la fermeture annoncée de deux trésoreries (Arc-en-Barrois et Montier-en-Der) avec ce constat "fermer une perception en milieu rural c'est condamner les petites communes à ne plus pouvoir fonctionner" et un dernier point sur l'évolution des pratiques agricoles qui rejoint le propos de la pétition.

 

Des nouvelles de la campagne. Chronique 1

Dans cette chronique je viens donner quelques points de vue sur le devenir des communes et espaces ruraux, à partir d'informations pêchées dans la presse ou les réseaux locaux. (si je suis consciencieux cette première aura des suites, à échéances plus ou moins régulières…)

En page 2 du JHM de ce 17 mars, l'article « Les communes invitées à « mobiliser » plus de bois » est une belle illustration de la politique de l'offre et de l'austérité des budgets publics appliquées à la filière bois. Ou pour le dire crûment : une affligeante démonstration de la dérive productiviste vers laquelle les pouvoirs publics poussent la filière bois.

Tout d'abord est confirmé ce que les communes forestières savaient déjà : en bon serviteur des préceptes de l'économie libérale, le gouvernement ne veut plus financer l'Office National des Forêts. Pour assurer son budget celui-ci doit donc s'en remettre de plus en plus à son activité commerciale de vendeur de bois pour le compte des communes, dont il prélève 20 % des recettes forestières. D'où l'incitation faite à ces communes de « mobiliser » plus de bois... La boucle est bouclée de la baisse du budget de l’État à la hausse de la production de bois, sans qu'à aucun moment ne soient questionnés l'équilibre de l'écosystème forestier et la demande réelle en bois, l'essentiel étant que ce bois soit offert au marché. Au passage l'ONF est invité à « se réformer dans ses pratiques et sa gestion ». On sait désormais ce que « réformer » veut dire : il y a trop d'agents à l'ONF et pas assez de productivité par agent, donc il faut supprimer des postes, augmenter les cadences de travail, faire plus de commerce à court terme et moins de gestion forestière à long terme.

Ici s'affrontent deux conceptions d'un bien public comme la forêt communale. D'un côté les libéraux qui estiment que le bois est une marchandise comme une autre, faisant l'objet d'un marché entre un propriétaire (la commune), un prestataire intermédiaire (l'Office National des Forêts) et un acheteur (le marchand de bois), chacun devant y trouver son revenu. De l'autre les écosocialistes dont je suis, qui estiment que la forêt est d'abord un bien commun de la collectivité publique et un écosystème. A ce titre elle ne constitue un revenu qu'aux conditions de réserver un même niveau de revenu aux générations futures et de préserver un écosystème nécessaire à la biodiversité et à la captation du carbone. Le bois ne peut en aucun cas être une marchandise banale et abondante sur un marché libre, mais doit être une ressource durable dont le marché est régulé par la puissance publique pour un volume et une qualité répondant à une demande connue.

Derrière une façade optimiste et volontariste, il faut lire dans cet article un avenir sombre pour les forêts communales et les agents de l'ONF. Les unes et les autres vont avoir besoin du soutien des citoyen-ne-s qui estiment qu'une ressource naturelle est un bien commun dont toutes les générations doivent pouvoir jouir et non pas une marchandise vendable et épuisable au bon gré du marché.

L'article « Fermeture de la trésorerie : Andelot ne va pas se laisser faire » dans la JHM du 18 mars informe de la décision du Ministère des Finances de fermer des perceptions, et rend compte du refus de ces fermetures par des élus locaux. Comme élu local moi-même je rejoins pleinement cette ferme opposition.

Pour le citoyen ordinaire une perception fermée est un service public qu'il devra aller chercher plus loin quand il en aura besoin. Mais le service aux contribuables individuels n’est pas le principal travail d'une perception. Les personnels des agences du Trésor Public en milieu rural passent une grande part de leur temps à la conception et au suivi des budgets publics : communes, communautés de communes, syndicats intercommunaux. Là où des villes comme Chaumont ou St-Dizier disposent de services financiers qui leurs sont propres et qu'elles ont les moyens de se payer, les petites communes rurales bénéficient auprès des perceptions d'un service compétent et gratuit dont elles n’ont pas les moyens sur leurs budgets.

Là encore il convient de lire entre les lignes : fermer une perception en milieu rural c'est condamner les petites communes à ne plus pouvoir fonctionner. L’État voudrait pousser à la suppression des communes avec l'air de ne pas en être responsable qu'il ne s'y prendrait pas autrement. Il s'agit là ni plus ni moins que de décourager les élus locaux et de les amener à décider par dépit de fusionner leurs communes, leurs communautés de communes, de supprimer des syndicats intercommunaux. Cette politique est intolérable et doit trouver en face d'elle des citoyen-ne-s décidé-e-s à ne pas laisser faire. Comme je l'ai déjà dis et écris, je ne suis pas arc bouté sur la préservation des petites communes. Mais se voir imposer un calendrier pour des fusions qui échappent à la décision de leurs habitant-e-s est une injure à la seule souveraineté légitime, celle du peuple.

La troisième nouvelle vient d'échanges de courriels entre contacts locaux. Près du village de Puellemontier, une prairie humide a été dernièrement transformée en champ labouré, sans doute pour une mise en culture. Que redire à cela dans la mesure où le propriétaire est libre de disposer de sa parcelle comme il l'entend ? Sauf qu'en y regardant de plus près, ce changement du paysage n'est pas aussi anodin qu'il en a l'air. Quand cette disparition de prairie humide s'ajoute à bien d'autres disparitions identiques à bien d'autres endroits, cela montre combien l'intérêt collectif de la préservation de l'espace naturel est sacrifié sur l'autel de la sacro sainte propriété privée.*

Dans le cycle de l'eau, une prairie humide est une zone privilégiée de rétention et de filtration d'eau, donc de régénération à peu de frais des nappes phréatiques. A défaut, la pluie s'écoule sur le sol pour rejoindre les cours d'eau. Celle-ci ne reste plus sur place et n'est plus filtrée. Supprimer les prairies humides c'est restreindre la ressource en eau potable et devoir la traiter plus, donc augmenter le prix de l'eau au robinet. A ce titre une prairie humide est bien d'intérêt collectif, quand bien même elle soit propriété privée.

A un second niveau l'herbe est la nourriture privilégiée des vaches. La suppression des prairies est le signe indirect du mode intensif de production vers lequel sont poussés les éleveurs laitiers et qui fait leur détresse : le prix du lait exigé au plus bas par l'industrie agroalimentaire et les distributeurs poussent les éleveurs à trouver la rentabilité dans de méga fermes de plusieurs centaines de bêtes qui restent confinées en stabulation et ne voient plus une prairie. Le lait ainsi produit par des ruminants qui ne broutent plus est de qualité nutritive médiocre. Et il est pollué par les antibiotiques que les éleveurs sont contraints d'utiliser pour que leurs vaches ne succombent pas aux maladies inhérentes à la promiscuité. Là aussi, et pour la qualité des produits laitiers que le citoyen consommateur est en droit d'attendre, une prairie humide est bien d'intérêt collectif.

Qui disait que nos communes et espaces ruraux n'avaient rien à voir avec la politique décidée à Paris ?...

* J'invite à signer la pétition en ligne « Halte au massacre des paysages haut-marnais » adressée à Mme le Préfet de Haute-Marne.

 

Détruire les paysages (ici prairies, haies...) c'est réduire l'attractivité de notre département
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